Je suis né le 21 décembre 1976 dans la ville de Mouila au Gabon. Sur les rives du fleuve où j’ai vu le jour, il se raconte que le pleur du nouveau-né est un cri (Ngongu) envoyé à Dieu pour exprimer sa déréliction. Au moment de l’expérience de l’abandon du père divin, l’angoisse s’ouvre. Seul le cri permet de se raccrocher, de ne pas mourir dans la bouche ivre de l’esseulement. Il en est de même pour cet exilé que je suis sur la terre de France où j’ai passé vingt hivers, loin des paysages d’enfance, l’épaisseur des couleurs et l’étoffe des parfums du matin primordial. Il en est ainsi tant les visages s’effacent et les voix des êtres chers ont des accents éteints. Le poème est dès lors devenu ma voix, mon cri d’errance en terre d’exil pour maintenir vivant ce qui fait monde en moi. J’écris pour ne pas oublier. Oublier serait mourir. J’écris pour ne pas mourir car c’est poétiquement que j’habite l’exil. Je suis encore étudiant quand le départ pour la France devient une évidence. J’effectue le saut en 2002. C’est le grand exil. La douleur et le manque du pays natal se renforcent. Le sentiment de mener une vie rétrécie me plonge dans une profonde mélancolie, j’écris plusieurs manuscrits dont L’Autre rivage de la nuit en Après plusieurs années sans quasiment sortir des murs de la région parisienne, je commence une série de voyages, découvrant un autre visage de la France, des villages, des montagnes, des rivières qui le ramènent à sa propre enfance. Je prends plaisir à voyager, marcher, randonner vers ces autres lieux, découvre leur mémoire, les manières de faire et de vivre de leurs habitants. Cette découverte de la vie des gens car c’est par la terre qu’on habite un pays. L’Énigme des ruines, le dernier recueil paru, est né de l’un de ces voyages.